Le château des Avenières, une demeure philosophale en Savoie

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Le domaine des Avenières (Cruseilles) ou le secret du sphinx

Les articles :

  1. Art du grimoire et Tarot
  2. à la recherche de la Rose bleue
  3. Oswald Wirth au Château des Avenières
  4. Le tarot des Avenières

Le château des Avenières

Mary Wallace Shillito est née en 1876, à Cincinnati, Ohio, Etats-Unis d’Amérique. Son père, puissant homme d’affaires, a fait fortune dans les chemins de fer, les mines de cuivre et les grands magasins de Chicago. Dès son enfance, Mary nourrit une vive admiration pour sa jeune soeur Violet. Adolescentes, les deux soeurs plongent avec délices dans un Paris en proie à l’orientalisme. Violet décède, âgée de 24 ans, à Cannes, en 1901, d’une fièvre typhoïde. Mary, inconsolable, parcourt le monde. Un bel après-midi de l’été 1904, Mary visite en compagnie de quelques camarades, dont sa meilleure amie Marcelle Senard (1879-1971), de modestes clairières vouées à la culture de l’avoine sur les flancs du Salève. Sans route carrossable, il leur fallait une heure pour monter à pied depuis Cruseilles. Elles sont saisies par l’exceptionnelle beauté du panorama. Instantanément, Marie prend la décision de bâtir ici le sanctuaire qu’elle rêve de dédier à sa soeur Violet trop tôt décédée… Ses parents viennent de mourir, elle est seule maintenant, à la tête d’une immense fortune. Elle achète le terrain, vendu par des agriculteurs de Cruseilles.

Ces terrains, jusqu’en 1789, appartenaient aux moines de l’abbaye de Pomier. Ils avaient été confisqués par l’état révolutionnaire et bradés à différents propriétaires. L’édification du bâtiment démarre en 1907 et durera 6 ans. Les pierres calcaires, tirées de la carrière de Comblanchien (située à 4 kms de la maison de Marcelle Senard, près de Beaune pas loin de Dijon en Côte-d’Or à 300 Km au sud-est de Paris et à 150 Km au nord-ouest de Genève), sont acheminées de Bourgogne par le train jusqu’à la gare de Saint-Julien, puis montées aux Avenières par des chars tirés par des boeufs . L’entreprise est cyclopéenne. Il n’y a pas encore de route, seulement des chemins agricoles.

Quand Marie n’est pas sur place pour superviser les travaux, elle visite les boutiques des antiquaires parisiens et rassemble une impressionnante collection de meubles rares destinés à son futur château. Elle profite aussi de ses séjours dans la capitale pour fréquenter des cercles dédiés aux sciences occultes et invite au château des savants, des artistes et des philosophes.

C’est ainsi qu’elle rencontre en 1913 Assan Farid Dina qu’elle épouse en seconde en 1914. Mary a 38 ans, Assan, 43 ans. C’est un petit homme rond au regard vif et aux traits asiatiques. Né à l’Ile Maurice de père indien et de mère française, ingénieur, spécialiste en hydroélectricité ( » la houille blanche  » qui remplace le gaz et le charbon),  Assan se consacre désormais à l’aménagement du château. A l’intérieur de l’édifice, il construit, entre autres, une mystérieuse chapelle contenant une vaste mosaïque montrant des symboles ésotériques qui représentent le savoir universel des religions. Le château est à la pointe du progrès avec son éclairage à l’électricité, le téléphone (numéro 1). Les Dina sont les premiers de la commune à avoir le téléphone. Le service n’est utilisable que quelques heures par jour à cette époque), son poste de Télégraphie Sans Fil (un poste de radio communiquant uniquement en morse. La radio transportant la voix n’est pas inventée à cette époque), ses automobiles et même son avion avec lequel Dina survole les Alpes.

Pour obtenir de l’électricité, ce dernier a conçu et fait construire sur les Usses une petite centrale électrique en aval du pont de la Caille. M. Dina n’a pas travaillé que pour lui-même. Il a profité de cette belle réalisation pour l’époque pour électrifier sur son passage Copponex, Cruseilles, Cernex. Cette innovation a été accueillie avec enthousiasme par toute la région. Elle a beaucoup développé les campagnes, notamment en permettant l’installation de petits moteurs électriques dans les fermes pour actionner les scies à couper le bois de chauffage, tourner les meules à aiguiser les lames de faucheuse, actionner les broyeurs à céréales et dans les fruitières pour actionner les barattes à beurre, pour brasser le caillé dans les grandes chaudières à faire les meules de fromage. Assan Farid Dina veut ensuite construire un observatoire ayant un télescope géant sur le Salève mais l’atmosphère du mont Salève n’est pas propice aux observations pour un tel télescope, tout au plus trois nuits par an.

Après 15 ans de vie commune, en 1928, Assan meurt lors d’une croisière en Mer Rouge, il est âgé de 57 ans. Mary fonde la librairie Véga (une étoile de la constellation de la Lyre, la plus brillante du ciel boréal, éloignée de 27 années-lumière de la terre). Le directeur de sa collection, René Guénon (1886-1951), philosophe et écrivain, s’installe à ses côtés aux Avenières. Elle a 52 ans, lui 42. En 1930, le couple part en Égypte. Trois mois après, Mary rentre seule…

Elle tombe amoureuse d’Ernest Britt, un pianiste suisse,  qu’elle épouse la même année et qui participe à sa déroute financière. Mary vend le château début 1936. Elle est alors âgée de 60 ans. Elle divorce en 1937 et décède âgée de 62 ans, en 1938, d’un brutal arrêt du coeur. Elle est morte et enterrée à Genève. Ses obsèques ont été payées par sa cousine, Béatrice Shillito. Son corps a été rapatrié… et réenterré en 1939 au caveau familial des Shillito à Cincinatti, Ohio, USA.

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Après avoir été une maison de repos, un collège oratorien, un rêve d’enfant pour Georges Duvernay et enfin le projet immobilier gigantesque de l’architecte suisse Haüsermann, le château a retrouvé en 1994 une nouvelle jeunesse. Aujourd’hui, le château des Avenières est transformé en un charmant hôtel-restaurant quatre étoiles

 

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Science et hermétisme