Les mille et une vie de la Joconde par Johan Dreue

La Joconde et ses nombreux visages : le portrait d’Isleworth .

Durant la première guerre mondiale, ce portrait voyagea aux Etats Unis. C´est là qu´elle fut acquise en 1962 pour une somme colossale par le multimillionnaire et collectionneur d´art, Henry Pulitzer.  Celui-ci écrivit également un livre : «  Where is Mona Lise ? » où il affirme que cette œuvre est un tableau de Léonard non terminé. Durant ce temps elle fut gardée dans une banque suisse. En 1979 à la mort de Pulitzer, elle passa, sans quitter la banque, à Elisabeth Meyer. En 2008 une association anonyme l´acheta : La Fondation Mona Lisa, qui poursuit son étude. Cette fondation date l´exécution de cette œuvre d´une ou deux décades antérieures à la Joconde du Louvre. Elle explique ainsi que leur Mona Lisa fut commandée par le mari de Lisa en 1503.

Quant à l´autre, cette du Louvre daterait de 1517 et son commanditaire ne serait autre de Julien de Medici, un admirateur de la dame. Pourtant cette Joconde (Louvre) arriva en France des mains de son auteur… et en 1517 Léonard habitait déjà le Clos-Lucé où il jouissait des mêmes honneurs qu´Andréa Solario et GIOVANNI GIOCONDO que le précédèrent de peu. Ce dernier au nom « souriant » fut surtout connu pour avoir édité l’une des premières versions imprimées du De Architectura de Vitruve, en 1511. Ce personnage au nom attirant était à Venise en même temps que Léonard de Vinci, le Titien et Giorgione, tous deux associés. Connu aussi par son nom français Jean Joconde.

Cette Mona Lisa fut la plus ressemblante à la Joconde du Louvre, jusqu´à la restauration de celle du Prado (2011-2012) Qui aurait était peinte en même temps que celle du Louvre, d´après les experts. Il s´agirait d´une femme plus jeune, d´environ la vingtaine d´années, âge de Lisa Gerardini, épouse de Giocondo, quand elle posa pour l´artiste. Donc la Joconde de Paris serait en réalité Constance D´Avalos ou Isabelle d´Aragon et celle de Isleworth serait la Lisa  de Giocondo !
Autre explication : pourquoi pas une « simple » copie d´un de ses élèves ?

Isabelle d’Aragon  – La Dame Joyeuse…

 

D’aucuns disent aussi qu´il s´agirait d´Isabelle d´Aragon, fille du roi de Naples, Alphonse II , donc héritière du trône de Jérusalem, qui épousa son jeune cousin, duc de Milan, Jean Galéas Sforza, auquel son oncle Ludovic Sforza, dit le More exclut de tout pouvoir, on dira même qu´il l´empoisonna dans une oubliette. Jean mourut à l´âge de 25 ans.  En 1490, Léonard fut chargé d’organiser les festivités pour célébrer le mariage de Jean Galéas avec Isabelle d’Aragon la fête fut une des plus admirable du siècle. D´après Serge Bramly dans sa célèbre biographie du Vinci, cette jeune veuve devint une intime du peintre de la Joconde au sein de la Corta Vecchia, l’ancien palais ducal où logeaient ces deux illustres personnages.
Elle eut trois enfants de Jean, dont la cadette, Bonne deviendra reine de Pologne. Bonne ressemblait à Isabelle, duchesse de Bari et on pense que c´est son portrait que fit Léonard dans le tableau  nommé Madone Laroque, retrouvé très ressemant dans cette ville française.

Vu la vie de cette femme, il n´est pas étonnant que Léonard dusse recourir aux  musiciens et aux bouffons afin de lui tirer un sourire. D’après Maike Vogt-Lüerssen qui pense que Mona Lisa est Isabelle d’Aragon, duchesse de Milan, celle-ci aurait eu de  Vinci cinq fils.   Cet auteur cite comme exemple : «  dans son écriture renversée, Léonard parle d’elle comme d’ « une certaine femme de Florence. » »….rien à voir avec Naples ou Milan.  Nous ne saurons jamais qui fut son modèle. Notons cependant que le prénom Florence signifie Fleur ! Tout comme Benedetto Gareth citait sa dame en la nommant LUNE.

Seul Giacomo Caprotti da Oreno, dit Salaï, le diable, ce garçon, voleur, têtu, menteur et gourmand, qui servit à la fois de modèle et de confident, restant jusqu’au bout l’intime de Léonard, seul lui,  peut-être, sût un jour qui fut la Dame, Mona Lisa. Mais, finalement, est-ce important ? Isabella di Aragona, comme on l´appelait à la cours italienne, était une Visconti-Sforza par sa mère. Le blason de cette famille est une guivre dévorant un enfant. Nous savons que la fontaine avec les niches à Bossuet, Fénelon, Massillon et Fléchier au cœur de la place SAINT SULPICE, à Paris s´appelle Fontaine Visconti, nom dû à son architecte Louis Tullius Joachim Visconti, qui dessina également la Fontaine GAILLON de Paris .En son honneur une cour du Louvre porte ce même nom. Un autre historien Giovanni Paolo Lomazzo, qui travaillait pour Charles Emmanuel, duc de Savoie, reconnu admirateur de Léonard, publia en 1584, donc après la mort de l´artiste, un livre sur la peinture, sculpture et architecture comme le fit aussi Vasari. Mais lui ajoute un petit détail : il parle de la Joconde ET de la Mona Lisa,  faisant sous-entendre qu´il y eut deux tableaux différents.

à Cortone sur les bord du lac Trasimène

(…) Elle prit les peignes en corne, attacha ses cheveux et remit son voile.

Rêveur, toujours à demi-allongé sur le sol, Leonardo l’observait. Il se mit debout et rouvrit la fenêtre donnant sur le balcon. Il lui demanda d’y venir une dernière fois pour admirer le paysage qu’il avait peint.

Il faisait doux. La lune éclairait la vallée. Les lignes épurées de leurs visages magnifiés par les reflets dorés de l’astre les faisaient ressembler à des icônes.

La prenant par les épaules, il lui montra du doigt les lueurs vacillantes des villages à l’horizon. La ville d’Arezzo, cette ancienne cité étrusque, apparaissait à la jonction des quatre vallées. Adossées aux montagnes, les imposantes forteresses et les élégantes églises éclairées par la lune semblaient justifier la toute puissance de la Toscane.

— Regardez, Lisa, qu’y a-t-il de plus beau ? Cette voûte céleste, aux étoiles éternelles, n’est-elle pas là pour nous rappeler que nous ne sommes que de passage sur cette terre stupéfiante de beauté ? Voyez, la position privilégiée de la Toscane a favorisé la succession de civilisations et de cultures différentes. Cette région conserve de nombreux témoignages appartenant à de multiples périodes de l’histoire, comme des trésors d’architecture, des œuvres d’art précieuses. Par mes dessins, j’y laisse aussi quelques traces de mon passage…

— Il n’y a rien de plus beau, murmura-telle. C’est une infime partie du monde et pourtant…

Ce soir, du haut de cette loggia, Leonardo dominait, tel un créateur d’univers, son pays de naissance, la Toscane ! Il avait devant les yeux un tableau plus beau que tous ceux qu’il avait peints. Ce paysage et ce qu’il représentait pour lui le bouleversaient. Ému aux larmes, parce qu’il aimait Louise, il voulait lui faire partager ses émotions. Il le savait… la jeune femme était la seule à le comprendre vraiment.

Elle vit ses yeux humides et devina ses pensées. Louise se sentit soudain triste de le quitter et appuya sa tête sur son torse… Elle ne put s’empêcher de laisser couler quelques larmes. Il ôta le voile de ses cheveux et l’em­brassa. Le temps s’arrêta…

Se ressaisissant, elle suggéra :

Leonardo, un jour, il faudra venir en France, chez moi à Romorantin.

J’y pense Lisa… Mais le roi, que dirait-il ? Je vien­drai plus tard, si Dieu me prête vie.

Trop bouleversée, elle décida qu’il fallait partir main­tenant sans attendre. Les mains tremblantes, elle ajusta son voile sur la tête et mit sa cape pour ne pas être reconnue puis, s’avança jusqu’au vestibule.

C’est l’heure de nous quitter, dit-elle.

Lisa, comme vous semblez sévère, ainsi accoutrée. Il n’y a vraiment aucune ressemblance avec mon portrait d’aujourd’hui. Qui pourra imaginer en découvrant mon tableau « sous la lune » que vous êtes, la mère du futur roi, Madame Louise de Savoie !

— Personne, cher ami, je suis tellement différente avec vous dans l’intimité. Ce portrait restera sans doute long­temps secret et deviendra peut-être une énigme, quand on le découvrira.

  • Voyons, attendez, lui demanda-t-il en lui baisant la main. Comment vais-je appeler la belle dame du portrait Mona Lisa… Qu’en pensez-vous ? Cela vous irait bien.

— Oui… Mona… Pourquoi ?

Il pointa un doigt vers l’astre qui brillait dans le ciel.

Mona, c’est une divinité, la lune personnifiée. Ce pseudonyme vous sied à la perfection. Dans la mythologie nordique on dit Mani. Dans la mythologie grecque, la déesse de la lune est appelé Séléné. Elle est décrite comme une femme d’une grande beauté… Tout comme vous, Lisa. On dit que, dès qu’Hélios le soleil, finit sa course dans le ciel, la déesse Séléné s’avance à son tour illuminant les ténèbres de ses cheveux argentés. Ces prénoms, Mona ou Séléné deviennent à Rome, Artémis ou Diane. Comme vous le savez, Artémis est une déesse chaste de l’Olympe qui a le plus inspiré les poètes pour Si pureté et sa beauté. Son culte était célébré dans des site particulièrement beaux, près des lacs et des torrents qui reflétaient la lumière de la lune dans la nuit. Ainsi mon tableau ébauché ce soir sur cette loggia représente cette déesse. Mona ou Artémis, cette belle déesse de la lune avec le lac Trasimène en arrière-plan… c’est vous, Madame !

Leonardo, je ne sais que dire…

Les déesses lunaires ne devaient pas être soumises à un homme, ne pas être esclaves d’une passion et encore moins avoir un époux avec qui elles seraient liées pour la vie. N’est-ce pas ce que vous êtes ? N’est-ce pas ce que le roi a exigé de vous ? Pourquoi n’êtes-vous pas remariée, Lisa ? Et si je vous demandais ce soir de m’épouser, accep­teriez-vous ? Je vous aime, Lisa…

Non, Leonardo, c’est impossible, répondit-elle en reculant subitement vers la porte. Mon fils sera roi. Il passe avant moi. Il passe avant nous. Mais, c’est promis, je resterai cette déesse de la lune, rien que pour vous. Rassurez-vous, je le pressens, vous viendrez un jour en France, quand mon fils sera roi et vous m’offrirez une belle fête du paradis comme celle que vous avez présentée en 1498 à Milan.

Il prit les deux mains de Louise qu’il posa sur son cœur et plongea son regard brillant dans le sien en disant :

Oui, faisons ce vœu, ce serait fantastique… je mettrai en scène une nouvelle Festa del paradiso: un chapiteau monté d’une toile bleue sur laquelle on verra toutes les planètes, le soleil, la lune et les douze signes du zodiaque. Nous serons assis tous les deux sous cette voûte imagi­naire… Vous serez la lune, je serai le soleil… votre amant pour la vie !

 Je vous fais confiance pour ce projet, dit-elle tout bas en tenant sa main. Pensez-y Leonardo… Ce rêve pour­rait devenir réalité  Elle ouvrit la porte. Elle était si bouleversée qu’elle sortit rapidement sans se retourner. En descendant, elle retint ses sanglots car elle venait de décider qu’elle ne le reverrait pas avant longtemps.

Elle l’entendit crier dans l’escalier :

Au revoir, Mona Lisa.

in Le secret de Mona Lia de Soizic Rolland de Kermorin


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