
Ashoka le Grand. Il accède au pouvoir en 273 av. J.-C. et s’efforce tout d’abord de consolider et d’agrandir l’empire hérité de son père Bindusâra. À la suite de la conquête meurtrière du Kalinga, il adopte les principes non-violents (ahimsa) du bouddhisme. Dès lors l’empire n’est plus troublé par la guerre et, en souverain pacifique, il s’emploie à l’organiser grâce à un corps important de fonctionnaires et une police efficace ainsi qu’au travers d’édits gravés sur des rochers ou des colonnes dispersés dans tout le pays. Il interdit les sacrifices, promeut le végétarisme et encourage la diffusion du bouddhisme en Inde et dans toute l’Asie.
L’empire d’Ashoka s’étend de l’actuel Afghanistan jusqu’au Bengale et aussi loin vers le sud que le plateau de Mysore mais il ne lui survit guère, s’effondrant en cinquante ans. Cependant, Ashoka est le premier souverain à réaliser l’unité de l’Inde sur un aussi vaste territoire et, consciente de son apport dans l’histoire nationale, la République indienne a emprunté au chapiteau qui surmonte le « pilier d’Ashoka » de Sarnath son emblème national aux lions et la roue du Dharma.

SIDDHARTHA GAUTAMA
L’enseignement direct du maître, qui dura près de cinquante ans, ne sortit pas de la contrée où il était né, de cette partie moyenne de la vallée du Gange, signalée par les historiens d’Alexandre, et qui s’étend autour de Bénarès. Mais il fut secondé par des hommes supérieurs, entre lesquels on distinguait le grand Çâriputra, Maudgalyâyana, Ananda. Il chargea soixante et un disciples éprouvés d’aller dans toutes les directions enseigner la Loi nouvelle aux peuples de l’Inde, y grouper les gens de bonne volonté autour de la formule « le Bouddha, la Loi, l’Assemblée, » et créer ainsi des églises locales, des communautés dépendantes de la communauté centrale que lui-même présidait.
Depuis la mort de Çâkyamouni (le dernier avatar de Bouddha) jusqu’au temps d’Alexandre le Grand, il s’écoula environ deux siècles. Pendant ce temps, le bouddhisme s’établit sur un grand nombre de points de la presqu’île indienne, principalement dans le nord. Mais il n’y devint pas la religion dominante. A l’arrivée des Grecs, les vallées de l’Indus et de ses affluents étaient occupées par les brahmanes. C’est la région que l’on nomme aujourd’hui Pandjâb, c’est-à-dire les Cinq-Fleuves ; c’est là que les chantres du Véda avaient composé la plupart de leurs hymnes et que s’était organisée, avec le système des castes, la société brahmanique. Les historiens d’Alexandre ne laissent aucun doute sur la prédominance de ce système social dans cette vaste et riche contrée ; A l’est des Cinq-Fleuves, on rencontre une belle rivière, la Saraswatî, souvent nommée dans le Véda ; elle descend de l’Himalaya et perd ses eaux vers le sud, dans les sables du désert. Puis on arrive à la Yamounâ et au Gange.
On était en l’année 325 avant- Jésus-Christ ; Alexandre ne conduisit pas son armée au-delà de l’Hyphase, le dernier des cinq fleuves ; il ne vit pas la Saraswatî ; mais il apprit que sur le Gange étaient réunis 600,000 hommes, commandés par un grand roi que Plutarque nomme Androcottos et d’autres auteurs Sandracottos. C’était le roi bien connu aujourd’hui Chandragupta. Sa capitale était Pâtaliputra, la Palibothra des Grecs, la ville moderne de Patna. Nanda, son père, avait régné vers 350 avant Jésus-Christ. Son fils fut Amitragâtha, nommé Amita sur les monnaies du temps et Amyntas par les Grecs. Son petit-fils fut le grand Açôka. Cette lignée de princes appartenait à la famille des Mauryas, sortie des rangs du peuple et parvenue au trône malgré l’hostilité des castes privilégiées.
Alexandre avait dit : « J’ouvrirai à toutes les nations des terres que la nature a tenues séparées. » A Suse, il avait marié ses amis avec des Persanes, « assignant aux plus distingués les femmes les pludistinguées. » Lui-même épousa Statira, fille de Darius. Pour mêler les civilisations, il choisit parmi les Perses 30,000 enfants, qu’il fit instruire dans les lettres grecques. Son expédition dans le Pandjâb fut suivie de l’établissement du royaume grec de Bactriane, dont le territoire s’étendait dans la vallée de l’Indus et descendait jusqu’au Guzzarate, c’est-à-dire jusqu’à la mer.

Après sa mort, ses généraux, devenus rois, suivirent ses traces ; ils exécutèrent en quelque sorte son testament. Séleucus entretint un ambassadeur, Mégasthènes, à la cour de Chandragupta, qui lui fit don de 500 éléphants ; cet envoyé écrivit sur l’Inde un livre, malheureusement perdu, et dont les fragments nous fournissent les premiers documents chronologiques certains sur cette portion de l’Asie. Mégasthènes mourut en 291 avant Jésus-Christ. Au même temps, Antiochus envoyait Denys à la cour de Patna. Ptolémée II entretint aussi un ambassadeur auprès d’Amitragâtha. Depuis cette époque, les relations ne cessèrent plus entre l’Inde et Alexandrie. Le centre principal de ces relations était la grande et savante ville d’Oujjayinî, l’Ouggein des Anglais ; cette ville est située vers l’ouest de l’Inde, non loin du tropique, sous le premier méridien des astronomes indiens. Quant à Alexandrie, les Indiens la désignaient par le nom de Romakapoura, la ville des Romains. Dans les inscriptions sur rocher du roi Priyadarçin, on lit les noms d’Antigone, de Magas, d’Antiochus et de Ptolémée, qui y sont présentés comme des vassaux du roi des Indes.

Le père et les aïeux d’Açoka ne s’étaient point détachés du brahmanisme ; mais, comme issus d’une caste inférieure, ils avaient, au dire de Plutarque, de nombreux ennemis, toujours prêts à se révolter contre des usurpateurs. Les choses arrivent en leur temps le bouddhisme, qui comptait déjà plus de deux siècles d’existence et qui appelait tous les hommes à l’égalité, offrait à cette dynastie un point d’appui dans ses adhérons de toute extraction. Chandragupta avait subjugué l’Inde entière. Quand son petit-fils Açôka monta sur le trône, en 268, il vit ses sujets partagés entre de nombreux cultes polythéistes ; chaque groupe avait son dieu particulier. Au milieu de ces cultes sans cohésion s’était établie l’église indivisible du Bouddha, puissante par l’unité de sa doctrine, par sa hiérarchie par la supériorité de sa morale et par son universalité. Açôka se déclara bouddhiste et ne songea plus qu’à faire régner la nouvelle religion, non-seulement dans l’Inde, mais encore dans le reste du monde. Il n’employa pour cela ni la persécution, ni la contrainte, ni aucun des moyens qui ôtent à l’homme quelque chose de sa liberté. Ses procédés furent tout autres et, on peut le dire, nouveaux dans le monde.
En effet, immédiatement après la mort du Bouddha, un concile avait été tenu par ses disciples dans la ville de Râjagriha, alors capitale du Magadha. Cette première assemblée, composée de 500 religieux, avait constitué ou du moins consolidé l’église dont Çâkyamouni avait créé les éléments. Elle en avait assuré l’avenir en rédigeant les trois livres, qui, sous le nom de Tripitaka (les trois corbeilles), contiennent les récits et paraboles, la discipline et la métaphysique. Cent ou cent dix ans plus tard, des points obscurs ou des divergences s’étant glissés dans la discipline, un deuxième concile s’était réuni à Patna, nouveau chef-lieu de la même contrée. Sous les princes Mauryas, cette ville était devenue la capitale de l’Inde entière. Açôka y tint le troisième concile en l’année 250, dix-septième de son règne, s’y déclara bouddhiste, y prononça la formule sacramentelle buddha-dharma-sangha : le Bouddha, la Loi, l’Église, et fit un message qui, répandu dans toute la péninsule, nous a été conservé gravé sur la pierre ; il est connu sous le nom d’édit de Bhabra. Dans ce concile fut fixé le canon des Écritures, qui devint ce qu’on a nommé la tradition du Sud. Puis on organisa l’Église en vue de sa propagation. Sous le nom de dharma-mahâmâtra, Açôka créa un ministère des cultes et des missions extérieures. Dès l’année suivante, dix-huit missionnaires partirent pour les pays étrangers ; leurs images se voient dans tous les grands temples de la Chine. Les missions bouddhistes rayonnèrent dans tous les sens : m’attendra, fils d’Açôka, prêcha entre 250 et 230 dans l’île de Ceylan, où il apporta le texte des Écritures, tel que le concile l’avait arrêté ; c’est ce texte pâli qui s’est répandu, soit en original, soit en traduction, dans tout l’extrême Orient, où nous le trouvons.
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