Les couleurs fleuries, attribut essentiel du compagnonnage et seul trait restant des anciennes guildes des maitres bâtisseurs du Moyen-Age. Des premières guildes nous ne savons rien car elles furent détruites avec l’arrestation des templiers puis de nouveau supprimées par l’édit de François 1er et décimées par la révolution française qui les interdit. Ce que nous connaissons du compagnonnage est une reconstitution tardive du XVIII ème siècle qui a a peu près la même valeur que la reconstitution de la Franc-maçonnerie en 1717, soit une valeur approximative. Mais il nous reste quelques vestiges comme la pratique des couleurs, symbole universel de virginité et de renaissance.
On doit à Jean-Michel Mathonnière cette découverte fondamentale pour la compréhension des origines du compagnonnage :
« Lorsque Laurent Bastard et moi-même avons commencé à étudier les archives des Compagnons Passants tailleurs de pierre d’Avignon ? il nous est rapidement apparu, entre autres éléments jusqu’alors ignorés ou tout simplement négligés, que l’attribut caractéristique et unique de ceux-ci sous l’Ancien Régime était les couleurs « fleuries », modèle partagé avec les Compagnons Étrangers — que ceux-ci portaient cependant d’une autre manière — mais nettement différent de celui employé par les autres corps du Devoir, à savoir les couleurs dites « de Sainte-Baume » puisque c’est en ce lieu que, depuis une date inconnue, elles recevaient leur gaufrage caractéristique. [Nota : les « couleurs » sont les rubans, de couleurs diverses, ornés ou non d’attributs, qui caractérisent chaque société compagnonnique.]
En effet, si aucun de leurs règlements du XVIIIe siècle ne mentionne la canne — qui semble n’être devenue que tardivement, au tout début du XiXe siècle, un attribut caractéristique et majeur des compagnonnages français- de nombreux articles y sont consacrés aux couleurs fleuries … »
et un peu plus loin :
« Il apparaît en tous les cas que charpentiers et tailleurs de pierre ont partagé ce symbole primordial de la couronne de fleurs. Car celle-ci occupe également une place très importante dans le patrimoine symbolique et rituel des Compagnons charpentiers du Devoir : sans divulguer davantage que ce qui est déjà connus, une couronne végétale intervient en effet dans leur Réception, du moins telle qu’elle était pratiquée à la fin du XIXe siècle. C’est à celle-ci que fait allusion la couronne de fleurs et de feuillages qui est figurée suspendue juste au-dessus de la tête du Compagnon charpentier dans certaines images-souvenirs du Tour de France, notamment celles qui sont dues au talent de Leclair, au début du XIXe siècle. Il en est d’ailleurs de même dans d’autres corps du Devoir, filiations et influences réciproques obligent.
L’attention étant ainsi focalisée sur ce point négligé, l’on ne peut dès lors manquer d’observer combien, parmi tous les thèmes symboliques présents dans la riche iconographie compagnonnique, celui des fleurs, des végétaux et des couronnes est surabondant. Au-delà de son caractère décoratif évident (qui faisait jusqu’alors écran à une interrogation spécifique), ce thème général est manifestement très important et bien d’autres éléments du patrimoine compagnonnique le confirment (voir, par exemple, l’usage des bouquets de Réception, ou encore, dans les rites et coutumes de la construction, celui des bouquets qui viennent « couronner » un édifice lors de sa finition). » Le serpent compatissant
Il était utile de le préciser : ces couleurs n’ont pas de finalité esthétique ou simplement décorative. Elles renvoient à quelque chose de plus profond, à savoir la dimension initiatique de celui qui les porte. Le sens qui s’y rattache est celui de Vertu et Honneur et renvoie à une réintégration dans un état de plénitude, celui que nous avons pu dégager dans notre étude sur la Tradition secrète des bâtisseurs qui n’est autre que la Merkhava. Son origine se situe dans les lointains mystères de l’Antiquité (Mithra par exemple) et se rattache également à la vie éternelle (couronne mortuaire). Porter les fleurs que ce soit à la canne ou au chapeau désigne donc un état d’élu. La cocarde portée à la boutonnière est un ancien reliquat des fleurs du compagnonnage.
aux fleurs succède aussi le parfum ce qui nous renvoie au vase de Marie Madeleine et son culture rendu à la Sainte Baume.
Il existe de nombreux indices quant à l’existence pour les compagnonnages de racines remontant à l’antiquité chrétienne, notamment à travers certains aspects de la légende de Maître Jacques (version Sainte-Baume) et de la géographie compagnonnique. Rappelons en effet que, outre le fait que la légende compagnonnique se superpose dans ce site à celle de Marie-Madeleine (la pécheresse qui avait oint les pieds du Christ de parfum puis avait été témoin de la Résurrection, avant de vivre elle-même une forme d’Ascension), l’assassinat de Maître Jacques à la Sainte-Baume offre des similitudes avec la Passion du Christ et que la majorité des sites auxquels se rattachent des « pèlerinages » compagnonniques se situe dans une aire qui est précisément l’une des principales zones de pénétration du christianisme en Gaule romaine : le delta du Rhône et le littoral languedocien.

Les guildes, les juifs et les templiers
L’histoire ultérieure de Maître Jacques était presque liée à celle des Templiers et probablement aux alliés juifs des Templiers dans les guildes d’artisans. Au début de son règne, le roi français Philippe le Bel a tenté de tirer parti de l’expertise et des ressources juives dans sa lutte contre la papauté. S’il protégeait les Juifs des tribunaux ecclésiastiques, il tentait également de les placer, ainsi que leurs richesses et leurs biens, sous son contrôle. Cependant, à partir de 1288, Philippe proteste contre le statut et la richesse croissants des Juifs, ainsi que contre leur collaboration avec les hérétiques chrétiens. En 1293, il accusa les Juifs de faire du prosélytisme en France, et en 1299, il leur reprocha d’accueillir et de cacher les chrétiens hétérodoxes, notamment pour les protéger de l’Inquisition. Cependant, quatre ans plus tard, lorsque l’Inquisition accuse les Juifs d’usure et de sorcellerie, il interdit aux prêtres de donner suite à ces accusations sur ses terres. En 1306, se plaignant du grand nombre de copies du Talmud en possession des Juifs, le roi émet un décret d’expulsion de France.
de gauche à droite : Maitre Jacques, le Roi Salomon, le père Soubise
Alors que Philippe le Bel persécutait les Juifs et confisquait leurs biens, il lançait également une enquête sur les Templiers, qu’il associait aux Juifs comme hérétiques et subversifs. En 1307, il ordonna soudainement l’arrestation de tous les Templiers du royaume ; quelques semaines plus tard, il annonça triomphalement que plus de cinq cents prisonniers avaient avoué les accusations d’hérésie. Les Templiers avaient déjà été accusés de collaborer avec les Sarrasins, mais maintenant les accusations laissent entendre qu’ils ont assimilé les vices « juifs ». De toute évidence, les Templiers portaient tous la barbe, une habitude interdite à la plupart des religieux et extrêmement rare chez les autres chevaliers. La signification religieuse de la barbe et l’attitude révérencieuse des cabalistes juifs à son égard étaient bien connues en France. Après avoir confessé leur culpabilité, les Templiers ont rituellement rasé leur barbe. Au fur et à mesure que les accusations s’accumulent, les Templiers sont dépeints comme des agents du Diable, qui cherchent à trahir et à briser « la maison du peuple de Dieu ».
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